vendredi 31 octobre 2008

Crise economique et crise boursiere: de la confiance a la mefiance

Dans un billet précédent, je m'étais appuyé sur la fable de la dame de Condé, un peu modifiée, pour mettre en valeur le rôle positif de la confiance en économie 'réelle'. Aujourd'hui , je ne peux résister au plaisir de reprendre l'historiette suivante, qui m'a été envoyée par Didier Saint-Gaudin. Nous verrons ensuite la 'morale' de cette histoire.

Dans un village, un homme apparut et annonça aux villageois qu'il achèterait des singes pour 10 € chacun.

Les villageois, sachant qu'il y avait des singes dans la région, partirent dans la forêt et commencèrent à attraper les singes. L'homme en acheta des centaines à 10 € pièce et comme la population de singes diminuait, les villageois arrêtèrent leurs efforts.


Alors, l'homme annonça qu'il achetait désormais les singes à 15 €. Les villageois recommencèrent à chasser les singes.

Mais bientôt le stock s'épuisa et les habitants du village retournèrent à leurs occupations. L'offre monta à 20 € et la population de singes devient si petite qu'il devint rare de voir un singe, encore moins en attraper un.

L'homme annonça alors qu'il achèterait les singes 50 € chacun. Cependant, comme il devait aller en ville pour affaires, son assistant s'occuperait des achats.


L'homme étant parti, son assistant rassembla les villageois et leur dit : «Regardez ces cages avec tous ces singes que l'homme vous a achetés. Je vous les vends 35 € pièce et lorsqu'il reviendra, vous pourrez les lui vendre à 50 €. »

Les villageois réunirent tout l'argent qu'ils avaient, certains vendirent tout ce qu'ils possédaient, et achetèrent tous les singes. La nuit venue, l'assistant disparut.

On ne le revit jamais, ni lui ni son patron ; on ne vit plus que des singes qui couraient dans tous les sens.

Confiance et méfiance: les deux 'mamelles' d'une économie monétarisée.
Comme le lecteur l'a sûrement déjà entrevu, cette histoire, qui pourrait s'intituler 'la Bourse pour les Nuls', illustre tout d'abord le fait que si en Bourse, on achète et l'on vend sur des anticipations de valeurs actuelles, et plus encore futures, ces valeurs ne sont jamais sûres.
L'histoire repose aussi aussi sur un mécanisme à la limite du délit d'initié : acheter à 35 € pour revendre à 50€, de façon à peu près sûre (ou que l'on croit telle).
Le fait que l'assistant et les villageois soient tous complices de cette malhonnêteté (ou que l'on croit telle) aux dépens du patron n'est qu'un épiphénomène, illustrant le vieil adage 'tel est pris qui croyait prendre'.
Bien entendu, l'homme et son assistant ont joué sur la cupidité des villageois pour monter cette escroquerie.
Que reste t-il enfin aux villageois: des actifs 'toxiques', ou 'pourris': les singes, qui ne valent plus que ce que d'éventuels acheteurs sont prêts à payer.

Retour à l'économie réelle.
Certes, on ne reprendra sans doute plus les villageois à de tels comportements. Mais c'est là que l'on retrouve l'économie réelle. Aller à la chasse des singes n'était nullement répréhensible - à quelques arguments écologiques près - . Et les villageois auraient pu s'arrêter lorsque le dernier singe avait disparu. Mais, en sortant de l'économie réelle, et en allant spéculer en bourse, en pensant ainsi gagner davantage, ils ont tout perdu, et la méfiance qu'ils vont maintenant avoir vis à vis de la bourse risque de se reporter sur l'économie réelle elle-même.

Histoire sans fondements diront certains: ce matin, j'entendais encore à la radio les fortunes (250 milliards d'euros) qu'avaient perdu des oligarques russes, rois du pétrole ou de l'aluminium, en transformant leurs richesses réelles en actifs 'toxiques' - ce qu'ils ne savaient pas à l'époque bien sûr. Faire confiance à l'économie réelle, certes, mais quand on ne fait plus confiance aux banques et à ceux qui sont censés les gouverner, ce n'est pas simple.

La morale de la morale: ne jouez pas en bourse, comptez plutôt sur vos propres ressources, celles de votre travail, passé, présent ou à venir. Si vous avez des économies, et si vous voulez à tout prix placer votre épargne, visez plutôt les obligations et bons du trésor, voire dans le livret A, c'est plus sûr. Une rentabilité de 4% (2% en termes réels), cela ne fait pas fantasmer, mais vous ne volez rien à personne, puisqu'une telle rentabilité est simplement adossée, bon an mal an, à la croissance de l'économie réelle.

Attention aux mirages de la Bourse:
Si cela ne vous suffit pas, sachez que en cherchant une plus grande rentabilité - dans rentabilité, il y a 'rente', donc 'rentiers'- vous contribuez vous-même aux bulles spéculatives pour lesquelles vous chercherez tôt ou tard des boucs émissaires - sport dans lequel la société Générale et la CNCE sont passés maîtres-, alors même que vous en ferez partie.

Aucun commentaire: